Portrait de la petite dame aux roses
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On la prénommait
céleste. A l' État-civil
c'était Célestine.
Mais sur les bancs de l'école
son surnom était Titine.
Céleste allait mieux
à son humeur angélique.
Cela lui resta.
Fille aînée de la tribu
elle en fut la référence.
Célestin, son père,
sabotier de son état,
tenait son échoppe
au bas du quartier du Port,
apprécié de ses clients.
La mère, Marie,
gérait la maison de main
ferme acquise au temps
de la captivité du père,
sur les confins germaniques.
Rentré diminué
Célestin reprit son art
-car les sabotiers
sont des artistes soucieux
des pieds laborieux et humbles.
Et la maisonnée
Se plia comme tant d'autres
dans l'entre-deux guerres
à la poigne de la mère
bientôt aidée de la fille.
C'est dans ce cocon
que Céleste découvrit
la simplicité
d'un enfance heureuse et claire
parmi ses sœurs et ses frères.
Et joyeuse aussi.
Puis vinrent les soubresauts
de l'adolescence...
A vingt ans elle épousa
un gars du quartier sans plus
de métier ni loi,
portefaix qui bientôt fut
un fieffé coquin...
Pour échapper aux gendarmes
il partit sur le trimard,
et laissa Céleste
élever ses trois marmots
et reconstituer
la tribu de sa jeunesse
avec sa mère vieillissante.
Usé avant l'âge,
Célestin mourut, laissant
aux siens un jardin,
en bordure de Vilaine,
un paradis pour les fleurs.
C'est là que Céleste
avait fait ses premiers pas.
C'est là qu'elle apprit
à son tour le jardinage.
Et lui vint l'amour des roses.
30.01.17