Métaphysique 7


Quand le jour se lève
en moi, comment réveiller
la bête assoupie ?
Lui claironner aux oreilles
la diane de nos casernes,

ou la sonnerie
des couloirs de nos pensions,
ou le carillon
des salons des bonnes œuvres,
en mémoire de nos vieux ?

Ou faut-il laisser
l'ankylose des paresses
revenir en force,
accorder un court sursis
à l'Esprit, pour se reprendre ?

30.09.11

Anguille équitable


Dans les joncs, l'anguille
pointe son nez pour croquer
l'imprudente mouche
ou le petit ver de vase.
Seul le friselis de l'eau

trahit sa présence.
Pêcheur soit très attentif
Pour lancer ta fouine
car si tu rate ton coup
les anguilles seront loin !

Mais la loi commune :
« Manger ou être mangé »
est-elle équitable,
quand on voit se tortiller
les anguilles dans la poêle ?

Faudra-t-il promettre
un jugement indulgent
au pêcheur bredouille,
quand on sait les prédateurs
des pêcheurs miraculeux ?

26.09.11

Métaphysique -8

Je ne peux pas croire,
à force de découper 
ma vie en rondelles,
que le savant fou m'oblige
à nier toute essence en moi !

23.09.11

Métaphysique-6


Les mots se font rares
comme si s'en tarissait
le bouillonnement
Est-ce par prudence ou par peur
qu'ils se retiennent ainsi ?

Confiance se cache,
elle a peur de dévoiler
sa naïveté,
quand son sosie fait la loi
sur la place du marché.

Pour L'Homme et La Femme,
sous le scalpel des chercheurs
en déconstruction,
il n'est plus de sens commun,
mais des flux et des osmoses.

Où nous conduit croire
si la croyance est avgeugle
et n'a plus de chien
pour nous guider sous les voutes
croulantes du patrimoine ?

Et Dieu, l'innomable,
peut-on lui faire confiance,
si son pur esprit
est créé à notre image
et à notre ressemblance ?

Et pourtant je vis.
Cette vie vivante en moi
J'en ai bien conscience.
Ce principe que je cherche 
au delà, n'est-ce pas elle ?

Passage dans l'estuaire – 2


Les rives s'écartent.
Accoste sous le vieux chêne !
Ses bras font silence
sur le foyer du regard..
Pour un soir, amarre là !

Cesse de compter !
Car le temps ne compte plus
en ce nouveau monde.
Ne sois pas un bateau ivre !
Les « Peaux-Rouges » crient ailleurs.

N'imagine pas
ce que tu feras demain !
Car ton équipage
va souffler tout comme toi,
et vivre sa vie nouvelle.

Tends l'oreille au vent !
Au matin il te dira
l'appel de l'Esprit,
les hymnes qu'il faut chanter.
Tu hisseras haut la voile

pour prendre à ton bord
tous ceux qui veulent passer
d'un rivage à l'autre :
bien chanceux des vieux naufrages,
pérégrins des terres vierges,

quêteurs d'absolu,
riverains des basses eaux,
ou pêcheurs de ciel.
Et s'ils demandent du pain,
ils ont aussi soif de rêves.

Ainsi la durée...
Plus tard, au vieux chêne, un soir,
reviens allumer
ton feu au regard du fleuve,
avant de prendre la mer !

Landévénec
15.06.96

repris les 19 et 20 Septembre 2011

Passage dans l'estuaire-1


Creusant ton visage,
de ta source à l'océan,
ton fleuve s'écoule,
œil fébrile qui te porte
et taraude en toi le temps.

Courant tourmenté,
Hier, aujourd'hui, demain
grossissent ses eaux,
coulant combien d'espérances
et qu'on ne remonte pas.

D'autres équipages,
descendant des hauts pays,
n'ont pas eu ta chance,
ont sombré dans les remous,
sont échoués sur les hauts-fonds.

Laisse aller ta barque !
Tu l'as fermement tenue,
si souvent contrainte,
et toujours dans le chenal.
Elle sait où te conduire.

Le courant faiblit.
Passé le dernier méandre,
s'établit l'estuaire
où les iles sont des leurres.
La mer est encore au loin...

19.09.11

Journée du patrimoine


On les dits ruinés.
Qui vole au secours des Grecs ?
Étrange faillite,
quant on voit tant de vautours
vouloir dépecer leur terre !

Mais quel est l'enjeu ?
Ce n'est pas sur l'Acropole
qu'il faut le chercher.
Mais au fond de notre tête
incapable de penser

un autre horizon
que la place du marché
pour le drachme au noir
qui pelote sa tontine
dans l'attente des vautours.

18.09.11

Merveille et gloire

Soleil de traverse.
Les vitraux -merveille et gloire-
révèlent leur vie,
sans doute pour que notre âme
puisse s'y fondre, en approche,

lorsque sa lumière
s'échauffe, s'approfondit,
grandit, s'élargit
jusqu'à devenir humaine,
au delà de la raison.

Et, bonheur suprême,
résume en une étincelle
la fusion de l'âme
et du corps que son creuset
accueille à jamais fixée.

17.09.11

Réamorcer la source


Dans le flot d'images
l'entendement perd ses marques,
la vue s'obscurcit,
l'harmonie des sons devient
incohérence des bruits,

le parfum des roses
s'évanouit dans l'épandage
de nos turpitudes,
un goût amer monte en bouche,
les doigts, aux claviers des touches,

sont désincarnés.
Saurons nous réamorcer,
en amont du fleuve
la source de l'émotion
qui fait de nous des humains ?

16.09.11

De quoi as-tu peur ?
La question ainsi posée
à mon tour m'effraie.
Pourquoi cette contagion
que rien ne peut justifier ?

Et pourquoi l'image
du lieu ,où cette question
s'est posée, s'impose,
comme si ce lieu portait
en lui-même une menace ?

« La forêt !...» dis-tu ?
Mais plus précisément quoi,
dans cette forêt,
sinon la chiche lumière
qui se meurt au pied des arbres ?

Elle nous égare
dans le fouillis des ronciers
sous futaie. Regarde...
même si dans la pénombre
le silence t'envahit,

Le peu de soleil
qui se glisse sur les mousses
nous dit la promesse
du bonheur du Petit Prince
émerveillé d'une fleur.

20.08.11