Nostalgie du regard
-

Vois cet horizon
où ton regard se disperse !...
Crois-tu que tu puisses
enjamber le gouffre ouvert
devant toi, pour dépasser

la hargne qui cerne
tes pensées et paralyse
la main qui se tend
vers toi pour te secourir
en t'évitant le mauvais pas.

Ose détourner
ton regard de l'horizon
dont tu crains les pièges,
pour discerner ton chemin
dans les ronciers de la lande.

Il te mènera
jusqu'au village perdu
de ta vieille enfance,
dans l'espoir d'y retrouver
l'ingénuité de tes rêves.

Peut-être est-ce là
que tu pourras effacer
le regret des manques.
Et voir à nouvelles chances
se dégager l'horizon.

30.11.16

Venise, ma belle !...
-

Tu as voulu voir
dans sa lagune en sursis
ta belle Venise.
Mais pourquoi as-tu choisi
Samedi jour de lessive.

Les cordes tendues,
Sans trop de vergogne, étalent,
en travers des rues
des vieux quartiers populaires,
les falzars et les liquettes...

Mais pas seulement...
Toyota emballe en bleu
le pont des soupirs
L'expresso les pieds dans l'eau
sponsorise ses travaux...

Place San Marco
les pigeons sont de retour
L'art contemporain,
à la Dogana, se cache
derrière les nouveaux monstres

marins. Et les chats
se pelotonnent sur les murs
à l'heure des siestes.
La ville musée, encore
longtemps, fera-t-elle face ?

29.11.16

Au Royaume de Champa
-

Sur les escargots géants de l'ile de Calomak

Le jeune Galant,
sur le seuil de la coquille
de Bernard l'Ermite,
marque un moment de recul
devant un lieu si intime.

Qu'y a-t-il au fond
qui l'induit en tentation
jusqu'à le leurrer
sur l'étrange coquillage
et la candeur de ses spires.

**
- Venez, venez donc !
Mon jeune et brillant ami !
Donnez vous la peine
de visiter mon palais
vous y serez si bien aise...

- Madame l'Ermite
excusez ma dérobade :
je suis claustrophobe.
Et si le propriétaire
revenait soudain,

qu'il nous surprenait...
- Oh, pas de danger, le pauvre
voilà bien longtemps
que je dus le dévorer
un soir de grande disette.

**

Pourquoi le Galant
entra-t-il dans la coquille ?
Il y est toujours.
Quand cela se sut, depuis,
On évite les parages.
28.11.16

Douce liberté
-

Vivre dans l'instant.
Tenter l'alliance du temps
et de mon espace
pour donner un peu de jeu
à la porte de la vie !

Passer par le chas
de l'aiguille est un exploit
que peu d'acrobates,
à force de contorsions,
réalisent au grand cirque.

Faut-il en déduire
qu' aujourd'hui c'est impossible
au bon paroissien,
à moins de persévérance
à la porte du Royaume ?

27.11.16

La petite dame aux roses
-


La petite dame
que l'on enterre aujourd'hui
eut une vie digne.
Et ceux là qui l'ont connue
sont venus lui dire « Adieu! ».

Personne n'est triste.
Elle ne l'eut pas voulu.
Et, parmi ses roses,
elle laisse une mémoire
rayonnante de lumière.

Elle était lumière,
même si le souffle court
des années dernières
embuait parfois les fleurs
qui embaumaient son jardin.

Avait-elle eut peur
de ne pas aller au bout
de l'œuvre entreprise ?
Elle n'en dit rien. Ses yeux
trahissaient sa joie secrète.

La petite dame,
entourée de ses enfants,
nous offre l'image
de sa sérénité d'âme
à l'effacement du jour.

26.11.16

Accès à la beauté

-


Que dire du beau
qui ne soit pas étranger
à ce que je pense,
mais qui au contraire exprime
le ressenti de mes sens ?

Comment exprimer
ce sentiment passager
de l'exaltation
quand le regard se déploie
devant l'objet qui le comble ?

L'harmonie sublime
qui touche l'oreille du cœur
est-elle traduite
sans fatale trahison
par la plume du poète ?

Le parfum qui nimbe
le corps aimé dans l'étreinte
est-il à lui seul
l'aiguillon du désir fou
sous le frisson des caresses ?

L'évènement reste
le maître de nos cerveaux,
donc de nos pensées,
et structure les réseaux
des champs de l'aléatoire.

La liberté seule
nous permet d'équilibrer
cette dépendance.
Mais l'accès à la beauté
demeure le grand mystère.

25.11.16

Qui changera la vie ?
-
Il y eut, je pense,
un étincelant coucher
de soleil offert
aux yeux éblouis des foules.
Elles retinrent leur souffle

jusqu'aux cris de joie,
venant d'échos en échos,
au cœur de la nuit.
Et le lendemain le ciel
parut si pur, si limpide !

Et dura l'état de grâce,
promis aux puissants du jour,
les trois premiers mois.
Plus tard le ciel s'assombrit :
la vie n'avait pas changé.

24.11.16

Droit d'usage...

-

...selon Erdogan (Arte du 22.11.16)

La Démocratie
n'est autre qu'un véhicule
de transport public,
que tu te dois d'emprunter
jusqu'au siège du pouvoir.

Lorsque tu en uses
il te faut en respecter
les règles d'usage :
saluer le conducteur,
payer ton écot, offrir,

à tous tes voisins,
ta figure la meilleure.
La conversation
ne t'engage en rien de plus
que d'être au mieux soutenue.

Et quand, parvenu
au terme de ton trajet,
tu descend du bus,
tu n'as plus aucun devoir,
à l'égard du véhicule.

23.11.16

Cauchemars d'automne
-

En lisant Le Livre des Merveilles de Marco polo

Hors d'ici, les monstres !
Si je sais où vous vivez,
non ! Je n'irai pas
vous forcer dans vos repaires
au milieu de vos complices.

Dans son fameux livre
Marco Polo dit de vous
que serpents vous êtes.
Votre enlumineur traduit
son dire en chimères folles.

Laissez moi tranquille !
Et surtout la nuit au cœur
de mes landes blanches
quand vos grognements sinistres
enflent la voix des tempêtes,

faisant de mes rêves
un charnier de peste noire
où vous vous vautrez,
pour tenter de me réduire
au plus profond de mon âme.

Hors d'ici, puissances
animalité sordide,
miroir de nos vices !
Que je retrouve la paix
dans un sommeil bienfaisant !

22.11.16

Valeurs des fraternités
-

La force des armes
qui légitime le droit,
aux yeux de certains,
peut paraître pacifique
en se jouant des Valeurs.

Les crimes commis
au nom de la Liberté
ne se comptent plus
tant le Jacobinisme
a gangréné la Nation.

Et l'Égalité,
ce versus de l'Équité
ferme trop souvent
l'accès aux fraternités
élémentaires du peuple.

Si l'autorité
drapée dans ses vieux symboles
veut nous faire croire
à sa légitimité,
elle doit rester humaine.

21.11.16